Matthieu Ricard : pour la santé et la planète, respectons les animaux... Plaidoyer pour les animaux...
Et si on mangeait moins de viande ou plus du tout? Les animaux et tout le monde y gagneraient. Matthieu Ricard explique pourquoi.
On aime les animaux, mais notre compassion s’arrête bien souvent au bord de notre assiette, constate Matthieu Ricard. Il est scientifique, moine bouddhiste et végétarien depuis 45 ans. «On s’émeut d’un petit chat jeté contre un mur par un voyou, mais on ne veut pas trop savoir que le même jour, 500 000 animaux sont menés à l’abattoir en France. On traite nos animaux de compagnie comme des enfants et on mange du porc ou du poulet, c’est irrationnel». Dans le prolongement de son livrePlaidoyer pour l’altruisme, sonPlaidoyer pour les animaux propose d’étendre notre bienveillance aux animaux, ceux qu’on mange, mais aussi ceux des cirques, des labos, des zoos, des corridas… Un livre particulièrement documenté qui s’appuie sur de nombreuses recherches récentes.
«Les animaux sont des êtres sensibles qui essaient d’échapper à la souffrance, de préserver leur intégrité physique, de survivre. On leur inflige des souffrances qui ne sont pas nécessaires pour des raisons moralement douteuses. Le problème, c’est qu’on ne voit pas tout ça! On nous vend ça dans des barquettes aseptisées, on leur donne de jolis noms. 50% des enfants des villes aux États-Unis pensent que la viande vient des usines. Quand on leur dit que ce sont des animaux, ça les choque».
Loin de vouloir faire la morale ou stigmatiser les carnivores, Matthieu Ricard lance plutôt une requête pour le respect des animaux, pour qu’après la lecture de son livre on ne puisse plus dire qu’on ne savait pas: il cite notamment des témoignages d’anciens ouvriers d’abattoirs, d’un ancien dresseur, de chercheurs… c’est parfois difficile à lire parce que les conditions dans lesquelles beaucoup d’animaux vivent et meurent sont détaillées dans toute leur cruauté.
«Ma requête c’est: ne détournez pas le regard et prenez en considération les connaissances qui sont les nôtres. Regardez, et décidez en votre âme et conscience. Ce n’est pas moi qui vais vous dire ce qu’il faut faire».
Matthieu Ricard, «Plaidoyer pour les animaux», Allary Éditions, 370p. Les droits d’auteurs sont entièrement reversés à des projets humanitaires.
Et si demain on devenait tous végétariens? Matthieu Ricard n’y croit pas. Mais il dit que si on diminuait notre consommation, ça serait bénéfique à bien des niveaux.
«Manger autant de viande ne coûte pas seulement la vie à des milliards d’animaux chaque année, cela aggrave la faim dans le monde, est mauvais pour la planète et pour la santé», rappelle Matthieu Ricard.
Pour nourrir les animaux d’élevage, on défriche des terres pour planter du soja à l’autre bout du monde. «775 millions de tonnes de céréales produites dans les pays en voie de développement servent à nourrir le bétail des pays riches chaque année», détaille Matthieu Ricard. Pour un rendement bien pauvre: il faut 10 kg de protéines végétales pour produire 1 kg de protéines animales. Alors que ces protéines végétales pourraient nourrir bien plus de monde là où ces céréales sont plantées: 1 ha permet de nourrir 50 végétaliens, mais seulement deux carnivores.
L’élevage est la deuxième cause d’émission de gaz à effet de serre, devant le transport. Il engendre une déforestation galopante, consomme énormément d’eau.
Manger trop de viande est mauvais pour la santé, ça, on l’admet assez généralement. Les gros consommateurs ont plus de risques de souffrir un jour d’un cancer ou d’un accident cardio-vasculaire. On dit aussi souvent qu’il faut de la viande ou du poisson, sources indispensables de protéines pour une alimentation équilibrée. C’est faux assure Matthieu Ricard : il y a 20% de protéines dans la viande contre 30% dans le tofu.
Les arguments courants comme «on mange de la viande parce qu’on a toujours fait comme ça», «c’est indispensable à notre équilibre alimentaire» et «la filière crée beaucoup d’emplois», il les balaye un à un de manière très argumentée dans son livre. « Nous ne sommes pas esquimaux ou peuples des montagnes, alors nous avons le choix de ne manger ni viande, ni poisson».
Il se réjouit que les mentalités changent, que l’on trouve de plus en plus de menus végétariens… jusque dans le Thalys. « L’évolution est lente, mais incontestable»…
Source: l'avenir du 22/10/2014
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